«
Selim Hacopian a écrit un livre. » Un écrivain renommé reçoit un
beau jour ce curieux mail, envoyé par un drôle de personnage qui
s’exprime à la troisième personne et souhaite que l’on « jette
un coup d’euille » à ses écrits. L’écrivain refuse poliment,
mais quelques jours plus tard, l’inconnu l’interpelle au détour
d’une rue et, à coup de « Monsieur l’Ecreuvain », finit par
obtenir gain de cause. L’écrivain s’engage alors, sans le
savoir, dans une entreprise littéraire de longue haleine, à
laquelle il va se consacrer corps et âme.
Entre
les étagères poussiéreuses de la bibliothèque, autour d’un café
ou dans le minuscule appartement de Selim, il apporte des
corrections, prodigue des conseils, souffle des idées de nouvelles
au jeune homme (lui qui a vécu en Égypte, pourquoi ne pas écrire
sur les chameaux ?) qui, bien vite, est contacté par une
prestigieuse maison d’édition.
Le
succès d’Hacopian grandit à mesure que celui de l’écrivain,
ayant délaissé ses propres romans, décline. Il lui vient alors une
idée : pourquoi n’utiliserait-il pas Selim pour publier sa propre
prose ?
"Selim
Hacopian a écrit un livre".
Voici
comment commence le courrier que reçoit le narrateur.
"Selim
Hacopian a écrit un livre."
Oui...
et ? pense-t-il non sans un certain cynisme.
Il
est habitué à ce que des écrivains en herbe lui envoient leur
manuscrit pour avoir son avis, après tout, c'est la rançon de la
gloire que d'être un écrivain.
Mais
voilà, "Selim Hacopian a écrit un livre".
Débordé,
le narrateur n'y prête pas attention et ne prend pas la peine de
répondre. Mais le destin est facétieux et le monde aussi petit
qu'un mouchoir. Il croise le fameux Selim dans la rue. Monsieur l'Ecreuvain...
"Selim
Hacopian a écrit un livre".
A
partir de cette rencontre, le narrateur perd tout contrôle sur les
évènements. Il se retrouve avec un CV dans les mains auquel il va
apporter maintes corrections, puis l'ébauche d'un roman, parce que
"Selim Hacopian a écrit un livre".
C'est
un roman court que nous propose Joachim Zelter, mais il n'y avait pas
besoin de plus de pages pour nous livrer ce portrait acide du monde
littéraire. Ecrivains, éditeurs, critiques littéraires, personne
n'est épargné dans ce monde où les repères ont changé. Qu'est-ce
qui compte le plus désormais : le roman ou l'auteur ; le fameux
cv que le narrateur corrige et recorrige ou le texte lui-même ?
Qu'est-ce qui est le plus important, la qualité du récit, de la langue ou
l'expérience de vie de l'auteur ?
La
plume est vive et décrit parfaitement cette spirale dans laquelle
tombe "Monsieur l'Ecreuvain", ses émotions ambigües, le mépris d'abord, puis
le désespoir en passant par la lassitude et l'incompréhension. Le
rythme se fait l'écho de cette téléréalité que devient l'univers du livre et de ces critères qui changent. Ces pages nous livrent autant de photographies de cette
société qui évolue : sur l'écriture évidemment, la
médiatisation, la starisation, mais aussi l'immigration,
l'intégration et l'importance de la langue.
Pour
certains, le récit paraîtra sans doute un peu extrême, j'en
entends même s'exclamer un "Il ne faut pas exagérer quand
même!" retentissant. Mais finalement, si on s'attarde un peu sur le
processus de fabrication de certains bestsellers, on se rendra compte
que ce n'est pas totalement infondé.
Je retiens :) !
RépondreSupprimerIl devrait te plaire je pense!
SupprimerJe ne connaissais pas, ça peut etre intéressant, surtout quand on voit que c'est différent
RépondreSupprimerOui, c'est vraiment un roman court/ une nouvelle très bien construite et très intéressante!
SupprimerNouvelle, et originale découverte pour moi ce roman ! Merci Céline :)
RépondreSupprimerDe rien!
SupprimerEh bien cette lecture paraît très intéressante alors je dis pourquoi pas ! :)
RépondreSupprimerJ'ai vraiment beaucoup aimé!
SupprimerJe pense que cette lecture me plairait aussi. Même si ça peut tomber dans l'exagération, évidemment, ça promet un humour assez grinçant dont je suis souvent friande.
RépondreSupprimerL'humour est vraiment grinçant, et effectivement, le récit tombe parfois dans l'exagération, mais volontaire et bien mesurée de la part de l'auteur.
SupprimerLa machine littéraire doit être terrifiante! Ce "portrait acide", comme tu dis, doit refléter de près la réalité, je n'en doute même pas...
RépondreSupprimerBises et bon dimanche Céline
C'est vraiment un portait assez acide, mais fidèle de cette machine. Assez terrifiant sous certains aspects, c'est vrai.
SupprimerÇa doit être super intéressant comme roman ! Par contre, je crois que je vais passer mon tour, j'aurais trop peur de déprimer après une telle lecture. ^^
RépondreSupprimerC'est clair qu'il a des côtés un peu déprimant...
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