mercredi 14 mai 2014

Le passage de la nuit, Haruki Murakami



Dans un bar, Mari est plongée dans un livre. Elle boit du thé, fume cigarette sur cigarette. Un musicien surgit, qui la reconnaît.
Au même moment, dans une chambre, Eri, la soeur de Mari, dort à poings fermés. Elle ne sait pas que quelqu'un l'observe.
Autour des deux sœurs vont défiler des personnages insolites : une prostituée blessée, une gérante d'hôtel vengeresse, un informaticien désabusé, une femme de chambre en fuite. Des événements bizarres vont survenir : une télévision qui se met brusquement en marche, un miroir qui garde les reflets. À Tokyo, le temps d'une nuit, va se nouer un drame étrange..

A chaque fois que j’ouvre un roman de Murakami, je n’arrive pas à le refermer sans en avoir vu le bout. Ce n’est pas de la frénésie de lecture, rien à voir avec ces moments-volés comme pour d’autres ouvrages, non. Il a le don de titiller ma curiosité, comme si un petit génie avait pris place sur mon épaule et me soufflait de continuer à tourner les pages. Comme si son écriture m’envoûtait. J’en suis la première surprise, parce que, comme pour la « Course au mouton sauvage », j’ai craint que le passage de la nuit ne devienne un livre oublié aux toilettes, le cimetière des livres que j’ai du mal à terminer…

Parce qu’il faut le dire, Le passage de la nuit est un livre lent, très lent…Mais un livre de belles rencontres nocturnes, et de rencontres avec ce que nous sommes. 

Murakami pose sa caméra dans cette Tokyo de nuit, où, de drôles de personnages, qui à priori n’ont rien en commun, se croisent et coexistent pendant quelques minutes -autant de séquences filmiques-, quelques heures. J’ai aimé cette Tokyo intimiste, très éloignée de l’effervescence et du mouvement perpétuel que j’avais en tête.

Mais il y a ce regard-voyeur, ce « nous » au présent de la narration qui observe ce qui se passe dans une chambre. Murakami, c’est un habile mélange de réel et d’irréel, de frontières qui s’effacent entre le rêve et la réalité, et dans le Passage de la nuit, ces frontières se font encore plus ténues, parce que la nuit tout est différent, et si pour nous elle ne dure que quelques heures, pour d’autres, elle peut ressembler à l’éternité. Alors on regarde, on observe Eri, douce incarnation de cet onirisme Murakamien.

Ces chapitres-là, qui reviennent régulièrement, m’ont dérangée. Je suis quelqu’un de pudique, de secret, aux antipodes d’un esprit espion-voyeur. Je me suis sentie de trop dans ces chapitres, dans ce « nous » auquel j’appartenais, comme kidnappée, et qui m’obligeait à regarder. Mais le talent de Murakami se trouve là. Ils m’ont dérangée, parce que j’ai ressenti l’observation, cette observation qui s’est matérialisée dans ma tête sous le pouvoir des mots. Cet irréel est devenu réel. 

La magie de Murakami. 

7 commentaires:

  1. Un Murakami que je ne connais pas, et qui me tenterait bien !

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    1. Il est vraiment sympa...Un peu déroutant (Murakami!), mais sympa!

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  2. ah c'est terrible d'avoir des livres comme ça n'est-ce pas ? Mais ça fait toujours si plaisir !

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  3. Belle chronique , et je m ' appercois qu 'avec la lecture c 'est pire car on se fait son propre film dans sa tête et du coup l ' imagination est plus forte .

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  4. Je ne connais pas ce titre mais belle chronique en tout cas, qui donne envie de le lire.

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