jeudi 5 septembre 2013

Ailes de Feu, Laura Gallego García



Les anges n'interviennent pas dans la vie des hommes, sauf lorsqu'il est question de préserver l'équilibre du monde. C'est pourquoi Ahriel accompagne María, la jeune souveraine de Karish, depuis sa naissance. Certains l'admirent, d'autres la craignent ou la jalousent, mais tous lui accordent le respect dû à son titre d'ange de la reine. Pourtant, le jour où elle parvient à déjouer un complot visant à saboter un accord de paix, Ahriel se fait piéger par un ennemi insoupçonné. Elle est alors exilée à Gorlian, un lieu sinistre et maudit duquel personne n'est jamais revenu et dont on ignore presque tout. Accablée par la culpabilité, Ahriel se fait un devoir de s'échapper pour mettre en défaut les conspirateurs qui l'ont dupée... Mais comment voler au secours du royaume alors même que ses ailes ne la portent plus ?

En lisant la chronique d’Effy Mathers sur Chroniques de la Tour, j’ai repensé logiquement aux ouvrages que j’avais lus de Laura Gallego García, et le tiroir de mes souvenirs s’est ouvert, libérant la palette d’émotions que j’avais ressentie lors de la lecture de Ailes de feu et de la suite, Ailes noires. La dureté de certains passages, la compassion et la peine, mais aussi parfois le soulagement ou l’attendrissement m’ont saisie à la gorge une nouvelle fois.

Un bon livre, c’est finalement cela, lorsque le souvenir est aussi présent, aussi intense presque, voire même physique, alors même que les années ont passé (ces lectures datent d’il y a deux ans environ), et que d’autres lectures ont pourtant abreuvé votre flux d’émotions.

C’était là l’occasion rêvée de vous faire découvrir cette auteure espagnole, cataloguée erronément à mes yeux dans « literatura juvenil ».

Dans Ailes de feu, le premier tome, vous rencontrerez l’héroïne, Ahriel, un ange. Dans l’univers de l’auteure, les anges sont les garants de l’équilibre du monde, et les protecteurs de ceux dont le destin peut influencer ledit monde. Ahriel, comme tout ange, est quelqu’un de bon, quelqu’un de respecté, de craint aussi.

Habituel me direz-vous. Rien d’original, ajouterez-vous. Certes, vous avez raison, présenté ainsi, rien ne nous éloigne des schémas habituels. Ahriel pourrait même, de prime abord, sembler lisse, trop lisse même pendant les premières pages.

Mais Ahriel est loin de l'être, et c’est là l’une des forces de Laura Gallego García. C'est un personnage complexe: on est loin du cliché de l’ange qui se noie dans sa bonté malgré un caractère affirmé. Tout au long des deux tomes, nous suivons l’évolution d’Ahriel, dont la blancheur s’estompe très rapidement, pour laisser place à une noirceur forgée par les évènements. Même les Anges ont une part d’obscurité en eux, et ce personnage, qui aurait pu être fade, prend une dimension toute autre sous l’impulsion de Laura Gallego García. Une humanité touchante l’enveloppe, et cette hauteur qu’elle prenait vis-à-vis des humains, cette condescendance finalement, se pose au ras-du sol pour finalement ressembler à la multitude du commun des mortels. Et elle nous apparaît, avec ses failles, ses faiblesses, ses carences aussi, et n’en est que plus belle.

J’aime beaucoup les romans qui ont pour protagonistes des Anges. J’ai adoré par exemple la saga de Nalini Singh (Chasseuse de Vampires) avec le beau Raphaël, ou encore l’excellent La malédiction des Anges de Danielle Trussoni, mais je regrette que souvent, les auteurs aient du mal à quitter les sentiers battus du conflit Anges / Anges déchus / Nephilim.

Sans compter que le potentiel du personnage de l’ange demeure dans bien des cas inexploité. On est souvent dans une vision très manichéenne du bien et du mal, induite par les personnages de l’Ange, de l’Ange Déchu et de l’humain (toujours cette humaine qui tombe amoureuse d’un Ange, souvent déchu…). Et que dire de la quête de la rédemption qui est un classique. C’est sans doute pour cela que j’ai autant aimé la saga de Nalini Singh, ses anges sont profonds, compliqués, et sortent de ce schéma si réducteur.

Je n’oserai pas comparer Nalini Singh avec Laura Gallego García (le premier Tome de Nalini Singh m’a littéralement habitée…), mais l’auteure espagnole a su me toucher, tant par sa plume que par son imaginaire. Chez elle, les anges font partie de l’ordre naturel des choses, il n’y a pas de lutte pour le bien ou le mal, du moins pas telle qu’elle est représentée habituellement. Dans son univers, l’enfer existe, tout comme un semblant de paradis qui est leur lieu de vie (il faut bien que leurs ailes leur servent à quelque chose !) mais ces mondes sont dénués de toute connotation. Ils existent, parce que c’est comme cela, comme existent les océans, les forêts, et j’ai trouvé cette liberté très rafraîchissante.

Contrairement, à mon avis, aux romans young adults tel que la série Hush, Hush de Becca Fitzpatrick, ou la saga Fallen de Lauren Kate, Laura Gallego García va jusqu’au bout de son intention. Elle ne se contente pas d’ébaucher les  choses. Gorlian est un endroit horrible, où règne le non-ordre, la peur, et qui doit inspirer du dégoût. Ses descriptions sont précises, détaillées et l’atrocité du monde de Gorlian prend vie au fil des pages, ce monde où personne ne veut aller et qui hante les cauchemars, un monde où la vie est impossible. 

J’ai souffert avec Ahriel, j’ai serré les dents avec elle, j’ai cherché la sortie en sa compagnie, et à aucun moment lors de ma lecture des deux volumes, je n’ai anticipé ce qui allait se passer. A aucun moment, je n'ai su comment cela allait se finir...

Une belle surprise, une belle réussite, une belle rencontre…  

4 commentaires:

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    1. Ce livre est vraiment une jolie rencontre pour moi...Je n'ai pas été "habitée", mais ai passé un très, très bon moment...

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  2. On sent tout le plaisir que tu as eu à découvrir cette histoire, que je ne connaissais pas du tout d'ailleurs !
    Donc nouvelle découverte pour moi ^^ Je le note dans un coin, bien que l'aspect sombre et dur me fasse un peu peur, je l'avoue...

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    1. C'est sombre et dur effectivement, mais c'est nécessaire pour retranscrire Gorlian. Garde à l'esprit également que c'est du young adults en Espagne, donc la noirceur est suppportable.

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